301ème RI

301e Régiment d’Infanterie

La vie de ce régiment est courte : d’aout 1914 à avril 1915. L’article reprend des larges parts de l’historique du régiment.


Mobilisation

Né au décret de mobilisation, prêt à entrer en campagne six jours plus tard, le 301e , formé en majeure partie de Beaucerons et de Sarthois, s’embarque en deux trains dans la nuit du 7 au 10 Août 1914. Direction : la frontière allemande.

Nuit à jamais mémorable pour les habitants de la petite capitale du Drouhais, dont beaucoup se séparaient d’un être aimé, avec la crainte angoissante de ne jamais le revoir. Si le visage des mères, des femmes, des sœurs, au moment de l’adieu, exprime l’émotion qui étreint les cœurs, la physionomie des soldats, martiale de vaillance et d’audace garde sa force et son ardeur.

L’émotion du sacrifice, elle est dans ce mot recueilli par un journal, d’une mère à sa fille après le départ du train : « A présent nous pouvons pleurer. »


Aussitôt débarqué à Charny le lendemain matin, le 301e se dirige sur Ornes, par Louvemont, à quelques kilomètres au nord de Verdun, c’est là qu’il doit cantonner et former dès ce moment l’avant-garde de la 54e division. Rien n’a diminué le fébrile enthousiasme du régiment, ni l’énervement de ces interminables journées précédant le départ, ni la fatigue du voyage, non plus que le rude chargement de campagne auquel les épaules de ces hommes de réserve ne sont plus accoutumées.

Le moral est en tous points parfait et c’est avec une légitime fierté et une confiance absolue, que le lieutenant-colonel CONVERSET, digne chef d’une telle troupe, peut regarder défiler le beau régiment qui marche allègrement vers le combat. Cependant, aucun de ces soldats n’est encore véritablement pénétré du rôle qui lui incombe ; chacun se fait encore difficilement à l’idée que c’est vraiment la guerre et qu’il va falloir lutter, souffrir et donner sa vie pour défendre le sol de France.

Brusquement, vers midi, alors que s’effectue paisiblement l’étape, un bruit sourd encore lointain, mais continu, se fait entendre, s’impose à l’attention de ceux qui voudraient ne pas croire encore. Les hommes tout d’un coup ont fait silence, ils sentent à cet instant précis que l’heure est grave, un frisson émotif vient de passer sur le régiment tout entier, le destin doit s’accomplir et chacun se sent désormais aux prises avec la poignante réalité.

C’est de Mangiennes que parviennent les bruits de la bataille ; une division de cavalerie allemande et deux bataillons du 130e R. I. (IXe corps) sont aux prises, l’artillerie française entre vigoureusement en action et déroute l’adversaire qui bat précipitamment en retraite. C’est le duel des deux artilleries. (75 et 77), dont les échos se font entendre bien au-delà de Ornes.

Dès son arrivée à Ornes, (10 Août 1914), le régiment assure sa sécurité par des travaux de campagne dans la direction de Mogeville, Étain. Le 14 août, il se dirige sur Ville-devant-Douaumont, derrière le IVe corps d’armée qui se porte vers Flabas, (la 54e division paraissait alors devoir suivre le sort de son corps d’armée). Le 16, reconnaissance vers Mangiennes.

Puis à la suite de la formation de l’armée de Lorraine, la 54e division est ramenée vers le sud le 17, et le 301e cantonne à Châtillon-sous-les-Côtes, jusqu’au 21, en faisant des reconnaissances et des travaux de campagne à quelques kilomètres en avant.

Le 21 août, étape de la division sur la route de Metz. Le 301e s’arrête le soir à Saint-Jean-de-Busy, avec avants-postes en couverture de la division à Olley. Le lendemain 22, la 54e division est redemandée à l’armée de Lorraine par le commandant de la IIIe armée et le 301e revient à Morgemoulin par Étain, dont l’encombrement est extrême. Il est environ 3 heures de l’après-midi, on se prépare sinon à cantonner, tout au moins à prendre le repas du soir, mais il faut renverser les marmites et partir en hâte deux heures plus tard pour se porter vers Amel, où pour la première fois le régiment voit tomber les « gros noirs » sur la route d’Étain à Spincourt, route qu’il va suivre vers la tombée de la nuit pour cantonner à Bellevue. Un premier ordre reçu pendant la nuit, prescrivait un mouvement en avant vers Xircourt. Finalement la division va occuper, dans la matinée du 23, la ligne Spincourt-Gouraincourt, face à l’est, la 107e brigade à droite, la 108e à gauche. Pendant la matinée et une partie de l’après-midi du 23, le régiment est traversé par les éléments des troupes qui se sont battues la veille vers Audun-le-Roman et qui se replient dans la direction d’Étain. Le régiment s’emploie toute la journée du 23 à fortifier ses positions à l’est et face à la ligne de chemin de fer. Canonnade allemande intermittente par obus de gros calibre, dirigés plutôt sur nos arrières. Pas de pertes.

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Combat du 24 Août

Mais le lendemain 24 fut une véritable journée de bataille : au petit jour, le 301e reçoit l’ordre de se porter sur l’éperon au nord de Gouraincourt, que le 302e occupe déjà. Immédiatement, des tranchées sont creusées parallèlement à la route Étain-Spincourt et à environ 400 mètres de celle-ci. L’artillerie allemande ne tarde pas a entrer en action, mais mal réglée, bien qu’un avion ait repéré la position, le 301e , qui est un de ses objectifs, n’est pas encadré et souffre peu de cette débauche de projectiles. Par ailleurs, une batterie de 77 installée face à Gouraincourt, ne tarde pas à être détruite par le 44e d’artillerie.

Vers 15 heures, après une reprise plus violente encore, mais tout aussi inefficace du tir de l’artillerie allemande, l’infanterie adverse cherche à déboucher, mais notre 75, peu bruyant jusqu’alors, entre tout à coup en action et avec une précision mathématique, fixe l’Allemand au sol et oblige ce qui reste à se terrer, tout au moins momentanément.

Mais l’ennemi réagit fortement, son objectif est Gouraincourt, il lui faut l’atteindre à tout prix. Une compagnie du 302e , installée à hauteur du passage à niveau de la voie ferrée, retint plusieurs heures la pression adverse, mais à bout de souffle, elle est débordée, les Allemands réussissent à franchir la voie ferrée. A ce moment le 6e bataillon sort de ses tranchées et se porte en avant, pendant que le 302e débouche de Gouraincourt.

La manœuvre s’exécute comme à la parade : précédé de son drapeau, au son de ses tambours et clairons, le 302e . appuyé à gauche par le bataillon du 301e (bataillon BERNARD), charge avec un magnifique entrain l’ennemi qui est refoulé au-delà de la ligne de chemin de fer. La nuit qui arrive termine le combat ; à part quelques patrouilles envoyées sur Gouraincourt en flammes, rien de saillant jusqu’au lendemain matin, l’ennemi parait désemparé et ne contre-attaque pas.

Nos objectifs ont été entièrement atteints, le 301e , en s’opposant victorieusement à l’avance ennemie, a brillamment reçu le baptême du feu. Au reste, ses pertes sont assez légères. A minuit, le régiment quitte ses positions et se dirige sur Azannes, après avoir dépassé Loison, il stationne à l’ouest de Billy-sous-Mangiennes, en soutien du 44e d’artillerie, mission qui se termine le 25 vers 13 heures.

Il se dirige alors sur Ville-Forêt, dans les bois de Mangiennes, où le régiment reste en position d’attente jusqu’à 22 heures. Il se remet ensuite en route vers Grémilly Azannes, où il passe au repos toute la journée du 26. Le 26 au soir, le 301e se dirige sur Maizey et Spada, à 6 kilomètres au nord de Saint-Mihiel, localités qu’il atteint après une marche de 60 kilomètres, sous une pluie diluvienne qui ne cesse qu’au petit jour.

Un bataillon prend, dès l’arrivée dans ce secteur, les avants-postes près de Rouvrois. Les 29 et 30, même séjour. Du 31 août au 5 septembre, le régiment se porte sur la rive gauche de la Meuse, par Génicourt, le 31 août, à (Béthelinville, Bethincourt, bois des Forges, le 1er septembre), le 2, à AvocourtEsne, retraite générale avant la Marne, le 3, à Nixeville. le 4, à Issoncourt, le 5, il atteint Rosne, où pour la première fois depuis le départ de Dreux, il aura des nouvelles exactes de la situation générale.

Des affiches officielles annoncent en effet le départ du gouvernement pour Bordeaux, clans la fameuse proclamation où la poussée des forces allemandes venues du nord était annoncée : « Cette situation impose au Président de la République et au gouvernement une décision douloureuse. Pour veiller au Salut National, les Pouvoirs Publics ont le devoir de s’éloigner pour l’instant de la ville de Paris. A la demande de l’autorité militaire, le gouvernement transporte donc momentanément sa résidence sur un point du territoire d’où il puisse rester en relations constantes avec l’ensemble du pays. Le gouvernement ne quitte Paris qu’après avoir assuré la défense de la ville et du camp retranché par tous les moyens en son pouvoir. Il sait qu’il n’a pas besoin de recommander à l’admirable population parisienne le calme, la résolution et le sang-froid. »

En même temps GALLIÉNI adressait à l’armée et aux habitants de la capitale la brève proclamation où il assurait de remplir jusqu’au bout le mandat de défendre la ville contre l’envahisseur. Ces nouvelles, la ruée allemande et l’exode du gouvernement à Bordeaux, provoquèrent une surprise d’autant plus impressionnante que chacun vivait dans l’illusion à peu près absolue que si « ça ne marchait pas très bien » de son côté, c’était absolument spécial au secteur où il se trouvait et restant bien persuadé qu’en Alsace, l’avance annoncée dès les premiers jours de la mobilisation se continuait et se développait avec rapidité et succès.

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Le 301e à la bataille de la Marne – Combats de Rambercourt-aux-Pots La Vaux-Marie. 

Depuis le 2 septembre I914, la 107e brigade faisait partie du VIe C. A. auquel elle avait été rattachée après dislocation à Béthincourt de la 54e D. I. de réserve, dont l’autre brigade était versée à la défense mobile de Verdun. C’est donc dans les lignes du 6e corps d’armée, au nord de Rambercourt-aux-Pots. que le 301e allait ajouter à ses jeunes annales une des pages les plus glorieuses, mais aussi combien douloureuse, puisqu’il allait perdre près de la moitié de ses effectifs.

L’ordre du jour de JOFFRE du 5 septembre venait de paraître : c’était la volte-face pour le coup d’arrêt. Le matin du 6, on traverse non sans difficultés le village des Marats, encombré par l’artillerie et dans l’obscurité la plus complète.

Le même jour, vers 5 heures du soir, le régiment rentrait dans la fournaise, il franchissait la ligne de chemin de fer à voie étroite entre la ferme La Vaux-Marie et la station du même nom, sous un violent barrage d’artillerie allemande pour occuper la côte 293 au nord de la route Vaux-Marie à Sommaisne. (Sommaisne : Sommet de l’Aisne, Source de l’Aisne )

Le mouvement dura à peine vingt minutes et se fit par bonds successifs de petits groupes, sous la
surveillance du colonel CONVERSET, posté à la station. L’attitude du régiment fut superbe de froid courage et de résolution tenace, officiers et soldats rivalisaient d’entrain.

L’ennemi en force, à cheval sur la vallée de l’Aire, occupait Sommaisne, Beauzé, Amblaincourt,
les bois Chanut ; toute la nuit il avait travaillé à consolider ses positions : de plus il offrait un objectif des plus incertains en raison de son peu de visibilité. Depuis le matin, les 54e et 106e étaient engagés dans la bataille, sans qu’aucune décision en faveur de l’un ou de l’autre parti ne fût encore intervenue. Des patrouilles ennemies furent refoulées des hauteurs de la côte 293 par le bataillon BOURGEAT, qui s’établit en première ligne pour la nuit.

Le régiment n’avait perdu jusque là que quelques hommes. Au nombre des blessés était le lieutenant DELAPORTE, officier de liaison. Le colonel s’installait avec son état-major au bivouac à 500 mètres en arrière, au milieu du bataillon BERNARD, au bord de la route.

La nuit fut magnifique, mais glaciale. Vers 3 heures du matin, il recevait du général de brigade, avec le texte de l’ordre à jamais fameux du général JOFFRE du 5 septembre, la mission d’occuper les hauteurs qui nous séparaient de Sommaisne, face à cette localité, en prolongeant à gauche la ligne déjà formée par l’autre bataillon, mais en faisant avec cette ligne un angle assez prononcé, de manière à relier la gauche du régiment avec la droite du 304e dans la direction de Rambercourt.

Ce dispositif aventuré était préjudiciable à la solidité de la ligne, mais la nécessité d’assurer la liaison avec le régiment voisin s’imposait et primait toutes les autres considérations du moment. La crête indiquée fut franchie et dépassée par la compagnie de droite, puis successivement par les autres compagnies s’étendant vers la gauche, de sorte qu’un trou se produisit bientôt entre les deux bataillons, trou qu’il n’était plus possible de boucher faute d’un seul élément resté disponible. 1 Sommaisne : Sommet de l’Aisne, Source de l’Aisne.

Pendant ce temps, toute la ligne avait été prise sous un feu violent d’artillerie de 77 et de 105. Le bataillon en marche avait particulièrement souffert, mais il n’avait rencontré aucune infanterie allemande jusqu’à 8 heures et s’était laissé entraîner en avant jusqu’au moment où il fut arrêté par les mitrailleuses et la fusillade, dans une position beaucoup trop en flèche.

Le général de brigade fut immédiatement mis au courant de cette situation par le colonel, qui lui demandait d’y parer en envoyant du renfort, mais il fit connaître qu’il n’avait aucune troupe disponible et qu’il fallait tenir coûte que coûte. La liaison était très difficile sur un front de près de trois kilomètres pour les deux bataillons, il n’y avait encore pas de service téléphonique organisé, et les coureurs, en risquant leur vie à chaque instant, rendaient la transmission des ordres et des renseignements très précaire et très lente. (Le P. C. de la brigade était à la fontaine des Trois Évêques). La situation s’aggravait à vue d’œil.

Vers 10 heures, le colonel fit connaître au général qu’il lui fallait absolument du monde pour combler les brèches de notre ligne et pouvoir tenir sur place sans risquer d’être enveloppé. Un bataillon du 302e arrivait une heure plus tard (bataillon LESUR) et consolidait la situation de la droite du régiment.

Mais l’ennemi s’était déjà glissé dans l’espace entre les deux bataillons du régiment, dont celui de gauche se trouvait alors complètement séparé de nous, au point qu’il ne fut même plus possible au chef de corps d’en avoir des nouvelles. Celui-ci décida de se porter de son côté avec sa liaison pour tenter de le rallier, mais au préalable, il donnait l’ordre au commandant BOURGEAT, dans le cas où il serait trop vivement pressé et menacé d’être enveloppé par sa gauche, de se dégager avec l’appui du bataillon LESUR (302e ) en pivotant sur sa droite et en rabattant sa gauche par échelons vers la ferme de Vaux-Marie. Compte rendu de ces dispositions fut envoyé immédiatement au général de brigade.

Le colonel CONVERSET passant avec sa liaison derrière la ferme de VauxMarie, se rendit lui-même vers la fontaine des Trois Évêques, mais le général de brigade n’y était plus et les fractions du 304e qui s’y trouvaient aux prises avec l’ennemi, ne purent orienter le colonel sur la situation du bataillon BERNARD. Force lui fut de rebrousser chemin vers la droite où il atteignit le bataillon BOURGEAT, au moment où ayant terminé son repli, il reprenait position sur la route Beauzée – Vaux-Marie. Il venait d’être relevé par un bataillon de chasseurs, et recevait du général de brigade l’ordre de se replier sur Érize-la-Petite.

Le général ESTÈVE, grièvement blessé en parcourant la ligne, donnait l’ordre au colonel CONVERSET de prendre le commandement de la brigade, qui devait se rassembler à Érize-la-Petite lorsqu’elle aurait été relevée. Il était environ 3 heures du soir ; à 5 heures les éléments principaux de la brigade étaient au lieu de rassemblement et compte rendu était envoyé au commandant du IVe corps, en lui demandant des ordres et lui faisant connaître le chiffre approximatif des lourdes pertes éprouvées par le régiment.

Mais la poussée de l’armée du Kronprinz sur ce point était définitivement brisée. La brigade toute entière passait la nuit du 7 au 8 au bivouac dans le ravin à l’est de Marat-la-Grande.

Le matin du 8 elle occupait des tranchées en réserve au Sud-Ouest de ce village, sous la pluie et sous la mitraille, pendant que les Allemands tentaient vainement quelques derniers efforts contre les lignes de Vaux-Marie.

Le 17 septembre, après une dernière attaque de nuit destinée à masquer leur fuite, les derniers casques à pointes disparaissaient à l’horizon. C’était la fin de la bataille de la Marne. En résumé, ces combats des 6 et 7 septembre avaient été glorieux pour le régiment qui témoignait de solides qualités d’endurance et de bravoure, qualités qui devaient s’affirmer dans les autres combats qui allaient suivre.

Malgré ses lourdes pertes, le moral du 301e n’était nullement entamé, une flamme guerrière l’animait, il était prêt de nouveau à venger ceux qu’il venait de laisser sur le champ de bataille. Le colonel CONVERSET dont la bravoure et le sang-froid ne s’étaient pas démentis un instant, allait laisser au commandant BERNARD, momentanément du moins, le commandement du régiment pour prendre celui de la 107e brigade.

Si la conduite des soldats du 301e fut admirable, elle n’eut d’égale que la vaillance de leurs chefs. Il faudrait pouvoir les citer tous pour être juste. Cependant, il est impossible de passer sous silence les noms des braves les plus estimés du régiment, en tête desquels se place le commandant BOURGEAT, tué plus tard comme lieutenant-colonel et qui se conduisit en brave entre les braves, et aussi comme un chef sachant conduire sa troupe et manœuvrer.


Le capitaine DESANDRÉ dont la bravoure n’avait d’égale que l’intelligence et la bonté, était tué à la tête de ses soldats. Tué aussi le sous-lieutenant DEPARDON, autre exemple de vaillance téméraire et de modestie.

Quant au capitaine BESSE, une des physionomies militaires des plus en relief et des plus aimées du 301e , l’enfant gâté des chefs de corps et dont l’intelligence, la belle humeur, l’activité et le courage reconnus par tous en temps de paix n’avaient à aucun moment atteint un degré aussi élevé que sur le champ de bataille, il restait pour mort aux mains de l’ennemi.

Mentionnons aussi :
le capitaine de FROMENT un des doyens du régiment actif et qui ne cessa pendant ces dures journées de communiquer à sa troupe l’esprit de vaillance et de devoir dont il était animé lui-même ;
le capitaine L’HOMER autre physionomie martiale et sympathique qui sut lui aussi, malgré ses cheveux blancs, insuffler à sa troupe la belle humour et l’allant d’un jeune sous-lieutenant.
Puis le capitaine GIRAUD, garde général des forêts, commandant de compagnie au-dessus de tout éloge (tué plus tard dans l’infanterie coloniale), et son sous-lieutenant SUSINI, l’as du 301e , dont le mépris du danger, l’audace juvénile et impétueuse, sont légendaires.
Le sous-lieutenant LEBIGOT, autre belle figure militaire du 301e R. I., qui cache sous une modestie et une timidité délicieuse les plus belles qualités militaires, véritable type de l’officier français.
Le lieutenant de réserve PILLON, tué aux côtés du colonel CONVERSET à la côte 340 le 25 avril, et de son chef de bataillon, le commandant PÉRIÉ, tombé le même jour.
Le sergent de réserve GAUQUELIN, tué comme sous-lieutenant le 24 avril dans la tranchée de Calonne.
Le caporal GLATIGNY. secrétaire de la conférence des avocats, toujours volontaire pour les reconnaissances périlleuses, blessé mortellement dans l’une d’elles. Le lieutenant de réserve DUGAT, rédacteur aux P. T. T., officier téléphoniste.
Le docteur CAUJOLE, médecin-major de réserve, chef de service du régiment, etc. . .

On voudrait continuer la liste, mais elle comprendrait tous les noms des braves du régiment, si on la voulait complète.

Vers le 12 ou 13 septembre, le régiment se trouve à Saint-André, près Souilly, le 13 au soir à Rumont, faisant partie de la défense mobile de Verdun, il évolue autour de la citadelle, le 16 septembre il bivouaque au fort de Douaumont et au village de Fleury, d’où il assiste sans y prendre part à la bataille de Montfaucon. Retour à Verdun (faubourg Pavé et Belleville), d’où le 301e part précipitamment le 19 septembre : Direction Haudiomont, Fresne-en-Woëvre. Le dimanche 20 septembre, départ d’Haudiomont pour se porter vers les Éparges, au devant de l’ennemi qui vient de forcer les Hauts-de-Meuse vers Combres.


Défendre Verdun

Les Allemands en effet ne se tiennent pas pour battus après l’échec qu’ils viennent de subir devant Troyon, ils se reforment et dès le 20 septembre ils reprennent l’attaque sur les Hauts-de-Meuse, dans l’espoir de tourner Verdun par le Sud. Quatre corps d’armée sous les ordres de von STRANTZ, partis de Metz, progressent rapidement le 20 jusqu’à la ligne Combres-Vigneulles-Thiaucourt et commencent à bombarder méthodiquement les forts des Hauts-de-Meuse, qui finissent par ne plus être que des monceaux de ferraille et de débris de béton.

Le 23, l’ennemi avance jusqu’à Seichepey. Cependant les forces mobiles qui défendent la région à un contre deux ou trois, ne forment qu’un rideau dont l’épaisseur diminue au fur et à mesure que l’on descend au Sud de Verdun. Le 24 septembre, les Allemands redoublent leurs attaques ; le 25, ils réussissent à prendre pied sur les Hauts-de-Meuse, dans la région de Vigneulles. Ils poussent, de là, sur St-Mihiel dans lequel ils pénètrent sans toutefois pouvoir traverser la Meuse. Mais, le lendemain, la rivière qui n’est défendue à cet endroit que par un bataillon de territoriaux, est franchie. Les Allemands commencent à remonter vers la vallée de l’Aire, dans la direction de Verdun. Le danger est pressant, le 16e corps, parti de Nancy, rejoint les forces ennemies, les bouscule et les oblige à se replier dans les faubourgs de Saint-Mihiel, mais il ne réussit pas à leur faire repasser la rive droite de la Meuse. Le 29 septembre, la ligne passe par Combres, Chaudoncourt, Apremont, Seichepey. La hernie est formée.


Les Eparges

Dans ce cadre général des événements militaires, revenons au rôle du 301e R. I. Le 20 septembre 1914, la 107e brigade quitte la région Ronvaux-Haudiomont avec la mission d’occuper le village des Éparges et la Crête de Combres, direction les Hauts-de-Meuse Combres.

Le 301e est en avant-garde, le 302e formant le gros de la colonne. La 23e Cie, en tête lieutenant BEAUREGARD, prendra direction indiquée par l’itinéraire Montsous-les-Côtes, Mesnil-sous-les-Côtes, Les Éparges. Section du sous-lieutenant FRAS (tué en 1916, au 117e R. I.) avant-garde. 24e compagnie, capitaine GIRAUD, sous-lieutenants SUSINI et LEBIGOT ; 21e et 22e compagnies, puis le 5e bataillon, commandant BOURGEAT.

Vers 17 heures, des avions ennemis survolent le régiment à la sortie de Mesnil (au moulin) et une patrouille de cavaliers envoyée vers le village des Éparges, reçoit des coups de fusil rapprochés. Il y a des blessés dans la section du sous-lieutenant FRAS, qui commande l ‘avant-garde.

Le village des Éparges semble occupé, la crête l’est certainement. Le 6e bataillon reçoit l’ordre d’effectuer alors la traversée des bois qui garnissent la crête des Hures en formation ad hoc. Le 6e bataillon décalant ainsi vers l’Est par rapport à son axe de marche primitif , s’installe dans la nuit vers la crête de Montgirmont. Le 5e bataillon va le conserver au contraire et marcher sur le village des Éparges. Il chasse les éléments allemands et pénètre assez aisément dans le village. Aussitôt le bombardement commence serré et bien ajusté, créant des pertes sérieuses dans nos rangs.

La nuit est arrivée. Le bataillon BOURGEAT en profite pour passer le pont des Éparges sur le Longeau et prendre pied sur les premières pentes de l’autre côté. Arrêt des compagnies sur place en formation déployée et travaux d’installation et de retranchement. Vers minuit, le capitaine L’HOMER, commandant le 6e bataillon, reçoit l’ordre de la brigade d’occuper avant le jour et coûte que coûte la crête de Montgirmont, afin de se pousser ultérieurement plus loin.

C’est en réalité à cet endroit que commence la vraie prise de contact du Boche : Aux Éparges ! qui allaient coûter si cher jusqu’en avril 1915. C’est de la crête de Montgirmont que partiront toutes les attaques furieuses de février, mars 1915, contre la fameuse crête.

La section LEBIGOT, 24e compagnie, est désignée pour effectuer immédiatement la reconnaissance préalable. Départ 0 heure, descente de la crête des Hures pour gagner la vallée séparant les Hures de Montgirmont. Cette descente protégée par des patrouilles s’effectue sans difficultés malgré une nuit d’encre, en suivant le lit d’un petit torrent presque à sec. Visite de la route Trésauvaux – Les Éparges

La section déployée (baïonnette au canon) gravit avec grandes précautions les premières pentes de la crête de Montgirmont et arrive à des taillis qui sont fouillés par des patrouilles.

La marche en avant reprend en direction des bois qui couronnent la crête. A l’entrée de ces bois, avant la crête militaire, on se heurte à des fils de fer récemment posés. On essaye en vain de les traverser, mais force est de prendre l’itinéraire suivi par les deux patrouilles opérant à l’est et à l’ouest du petit bois. C’est alors que le faible élément ennemi occupant la crête à l’abri des fils de fer, battit en retraite précipitamment en tirant quelques coups de fusil qui se perdirent dans la nuit.

Malgré la chasse organisée à travers le bois dès le début de la fusillade, aucun Boche ne put être capturé et la reconnaissance complète de la crête fut effectuée par la section encore groupée malgré une nuit intense. Le retour de la reconnaissance s’effectue à travers bois en cisaillant les fils de fer.

Vers 2 heures du matin, la section du sous-lieutenant LEBIGOT, moins une patrouille laissée sur la crête de Montgirmont, était de retour sur les Hures.

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Occupation de la crête de Montgirmont

Aussitôt le compte-rendu reçu à la brigade, l’ordre immédiat fut donné d’occuper avec tout le 6e bataillon la crête de Montgirmont, conduit et couvert par la section LEBIGOT. Le mouvement fut effectué sans incident notable et sans pertes.

Le 21, au petit jour, le 6e bataillon faisait face au Boche des Éparges, et commençait à creuser des tranchées avec l’outil portatif. C’est là que, pendant près d’une semaine, le 6e bataillon dut rester sans abri, difficilement ravitaillé, souffrant du froid très vif, tiraillant de temps à autre et faisant dans la nuit du 23 au 24, concurremment avec le 5e bataillon, une attaque de la crête des Éparges.

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Attaque de nuit du 23 au 24 Septembre 1914

Elle se déclenche vers minuit, par surprise. Objectif : la crête des Éparges, le 6e bataillon doit opérer de face, le 5e en flanc. La progression s’effectue d’abord sans difficultés. Nos éléments arrivent dans la vallée et s’engagent (sur renseignement de patrouilles qui n’ont pas été inquiétées) sur le flanc des Éparges. Arrivés à mi-pente, plusieurs coups de sifflet retentissent sur toute la ligne, les « Wer da » se succèdent et à trente mètres des tranchées ennemies (plusieurs tranchées en étage) nous sommes soumis à un feu nourri de mitrailleuses et de mousqueterie. Les flammes sortant des fusils nous aveuglent et les balles pleuvent de tous côtés. L’attaque par surprise est manquée.

L’ennemi nous a laissé approcher jusqu’à ses fils de fer, pour nous fusiller à bout portant. Le 5e bataillon a eu le même sort que le 6e , il a plus de pertes que ce dernier dont les éléments déployés et couchés ont pu être protégés par un angle mort. Par fractions, le bataillon regagne les positions de départ sur la cote de Montgirmont.

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MONTGIRMONT

Dispositif d’un bataillon en secteur Le 5e bataillon du 302e , en réserve, doit se maintenir solidement dans le village des Éparges et organiser, ainsi que le 6e , un repli sur la côte des Hures.

Le 24 septembre, le 106e établit une ligne de tranchées entre Montgirmont et les Éparges, le bombardement ne cesse d’un instant, le village est en flammes. Le 25 septembre, le chef de bataillon LESUR, commandant le 302e , reçoit l’ordre de prendre sous son commandement les éléments du 302e et du 301e ainsi qu’un bataillon des 304e et 106e et de recommencer l’attaque de la crête des Éparges après préparation d’artillerie, mais la position à enlever est trop forte pour que la marche en avant soit possible. Le 301e occupe toujours la crête de Montgirmont malgré de furieuses attaques de l’adversaire.

Le 28 septembre, à 1 h.30 du matin, une vive fusillade se fait entendre au village des Éparges, les corvées envoyées aux distributions au carrefour des Trois Jurés et sur les tranchées de Calonne, sont accueillies par le feu à bout portant d’une patrouille allemande qui s’était glissée le long des pentes Est du village. Quelques tués ou blessés, tout le secteur reste sur ses positions, l’ennemi se retire . Recherche fructueuse de fils de fer aux Éparges. Les compagnies de la crête des Éparges l’utiliseront afin d’augmenter la force de résistance de leurs tranchées.

Toutes les nuits : coups de feu aux avants-postes sur la crête des Éparges, côté Est de Montgirmont.

29 septembre. — Bombardement violent, dans la matinée le régiment est relevé à la crête des Hures et va cantonner à Mesnil. Des patrouilles sont envoyées dans la direction de la route de Combres à Champon, ‘où toutes les nuits on entend de nombreuses voitures descendre vers le Sud. Vers 22 heures, une de ces reconnaissances se heurte aux avant-postes ennemis, à 1.500 mètres environ de Trésauvaux.

30 septembre 1914. — Bombardement pendant une partie de la journée ; aussitôt après, les Allemands esquissent sur toute la crête des Éparges un mouvement en avant. Ils sont tenus en respect par des feux d’infanterie et de mitrailleuse. Le 4e groupe du 46e bataillon d’artillerie, prévenu de ce mouvement par son agent de liaison, couvre d’obus la tête des Éparges. Les Allemands s’arrêtent et bientôt se retirent dans leurs tranchées. La nuit, gelée blanche, les hommes sont transis de froid dans leurs tranchées. Dans l’après-midi, un officier de l’État-Major de la 12e division était venu se rendre compte de l’avancement des travaux défensifs et avait été surpris de la rapidité de leur exécution.

1 er octobre. — A 11 heures, un terrible bombardement s’abat sur les positions occupées par le régiment. Malgré une émotion violente, inhérente à une telle pluie d’obus, le régiment conserve son calme.

2 octobre. — A 17 heures, bombardement intense à la suite duquel les Allemands essayent de tourner par la gauche les compagnies de la crête des Éparges, feux d’infanterie et de mitrailleuses. Tout le régiment prend les armes, l’ennemi rentre dans ses tranchées.

3 octobre. — Une compagnie du 301e , capitaine GIRAUD, reçoit la mission d’occuper le bois au Nord-Est de la crête des Éparges. Ce mouvement peut s’effectuer à l’insu des Allemands. A 17 heures, la compagnie occupe le bois indiqué et commence des travaux de défense. A 18 heures, une deuxième compagnie est envoyée en renfort de la première. Un peloton borde la lisière Nord du bois en liaison rapprochée avec la compagnie GIRAUD, 2 sections en arrière débordant la gauche.

Ordre de la 12e Division n° 5 (du 11/10/1914). — « Depuis le 22 septembre, la 107e brigade d’infanterie formant groupement avec la 12e division d’infanterie, a tenu sans aucune défaillance ses tranchées dans des circonstances atmosphériques souvent défavorables et sous un feu constant de l’artillerie ennemie. En maintes circonstances, elle s’est montrée agressive et a fait preuve de mordant. Le général commandant la 12e division remercie les troupes de la 107e brigade, à tous les degrés de la hiérarchie, et particulièrement leur chef, M. le lieutenant-colonel CONVERSET, du concours qu’ils lui ont donné en toute occasion. « A dater du 6 octobre, les 301e et 302e R. I. font partie constitutive de la 12e division. « Le général HERR, commandant la division, leur souhaite la bienvenue, et ne doute pas que ces « vaillantes unités ne lui donnent à bref délai de nouvelles preuves de leur valeur offensive. » Signé : Général HERR.

Ainsi, la première bataille des Éparges de 1914, commencée le 20 septembre, ne se terminait que le 3 octobre amenant l’arrêt de la poussée allemande sur ce point et la stabilisation des fronts. A partir de ce moment allait s’effectuer une réorganisation générale en vue de la guerre de tranchées en secteurs. Après la dissolution de la 107e brigade, le 301e restait seul à la 12e division dans laquelle il allait former le troisième régiment de la 23e brigade, avec le 54e et le 67e , ayant la mission particulière de garder le sous-secteur du Bois-Haut, face à Saint-Rémy. Alternance de deux bataillons dans les tranchées par périodes de 3 ou 4 jours avec retour à Mouilly pour le repos.

Dans la tranchée

Voici donc le régiment définitivement fixé dans le secteur des Éparges où il restera jusqu’en mai 1915, s’accrochant successivement soit aux pentes mêmes de la crête, soit sur les croupes avoisinantes sans jamais s’éloigner de plus de quinze cents mètres de la formidable forteresse. Son rôle est donc pour le moment de tenir les tranchées.

Le secteur est par ailleurs extrêmement pénible ; le cantonnement de Mouilly où les éléments du régiment vont prendre leur repos est fréquemment bombardé ; les balles y sifflent même parfois.

Mouilly en 1915

Aussi bien y a-t-il nécessité de chercher d’autres abris à flanc de coteau, mais la nature du sol. les pluies continuelles les rendent difficilement habitables. Force lui est donc de retourner à Mouilly où des aménagements sont faits pour consolider les caves de la localité afin d’abriter le personnel.

La situation militaire ne permet pas au commandement de porter le régiment en réserve à un point plus éloigné des lignes, car d’un moment à l’autre il peut être appelé à intervenir pour renforcer les troupes dans ce secteur particulièrement difficile.

Peu à peu cependant les maisons du village les unes après les autres s’écroulent sous les coups de la canonnade et quelques-unes seulement restaient intactes au printemps.

Le presbytère, une des plus solides, restait encore debout, mais portait des lézardes de tous les côtés, la toiture était défoncée et la malheureuse bibliothèque du curé s’éparpillait au hasard des coups de vent et des intempéries. Il n’y avait rien à faire pour sauver du désastre tous les débris, tous les souvenirs plus ou moins intimes des paisibles existences que la guerre était venue surprendre dans ces lieux maudits et disperser, en attendant de détruire leurs habitations.

Tout tombait en ruines et tout finissait par passer au feu excepté ce qui pouvait être emporté pour servir à améliorer l’installation dans les tranchées et les abris de première ligne.

Il n’y avait plus de population civile à Mouilly depuis le mois d’octobre. Il n’y restait avec l’élément militaire que quelques rares animaux domestiques, chiens et chats, avec une vache et quelques poules qui étaient la propriété de la brigade.

Le séjour de détente du 301e pendant le premier hiver de la guerre était en réalité un véritable désert, pis que cela, un séjour de mort et de désolation, où les rues bordées de maisons en ruines ne voyaient d’autres mouvements que les allées et venues des distributions et des relèves, généralement dans la première moitié de la nuit en secteur et l’arrivée quotidienne aux premières heures du jour des morts et des blessés, les premiers pour être déposés dans l’église ouverte à tous les vents et être enterrés à la tombée de la nuit, souvent sous les obus, les seconds pour être remis entre les mains des médecins du corps ou de l’ambulance divisionnaire. En tranchée, la lutte était continuelle et le service extrêmement pénible, par suite des intempéries et des difficultés d’organisation.

Heureusement, le froid ne fut jamais très vif, et il y eut peu de pieds gelés, mais presque tous eurent les jambes plus ou moins enflées pendant une partie de l’hiver. De plus, la stabilisation n’arriva pas à se faire complètement pendant le premier hiver dans cette zone agitée. Il fallait changer à chaque instant, suivant les mouvements de la ligne, les emplacements des postes, des tranchées, des boyaux et des abris, ce qui obligeait la troupe à un travail de nuit qui dépassait les forces humaines.

Vers la fin d’octobre, le régiment avança une partie de sa ligne en occupant, dans la direction de Saint-Rémy, un bois de sapins indiqué par une côte 340 dans la carte au 1/80.000 ; ce bois se trouvait alors entre les deux lignes et les patrouilles allemandes y rencontraient quelque fois les nôtres.

Sur l’ordre du général de division et en vue de menacer le village de Saint-Rémy, le régiment occupa de nuit le bois par une compagnie, la 23e , commandée par le lieutenant BEAUREGARD. L’organisation du bois commença aussitôt et eut lieu assez rapidement, grâce à l’aide apportée par un détachement du génie, venu à cet effet. L’ennemi chercha à gêner les travaux par de violentes canonnades, mais le couvert du bois rendait difficile un bon réglage du tir, sauf sur la lisière, de sorte que bientôt trois compagnies du bataillon de grand garde occupèrent ce bois. Peu après, pour menacer encore de plus près le village de Saint-Rémy, l’ordre fut donné d’occuper par une section la dernière crête du terrain à l’ouest de Saint-Rémy, au nord de la route de Vaux-lès-Palameix.

Sous la protection de ce poste, commandé par le brave GAUQUELIN, tué plus tard héroïquement comme sous-lieutenant, de nouveaux travaux de nuit commencèrent, avec le concours du génie, qui construisit un petit fortin sur la pointe extrême de l’éperon dominant directement Saint-Rémy. Ce petit fortin fut occupé fin novembre par un poste avancé d’une section, mais il fallut immédiatement réduire cet effectif de moitié, pour éviter les pertes. Bientôt on se contenta de laisser dans l’ouvrage, ou plutôt dans les trous d’obus qui l’entouraient, trois sentinelles doubles qui devaient rester terrées toute la journée et se trouvaient, la nuit venue, prêtes à donner l’alerte.

L’artillerie ennemie continuait à couvrir le fortin de projectiles, pendant que nos sentinelles jouissaient d’une sécurité relative dans leurs abris de fortune à proximité. Ce qui amena tout naturellement les défenseurs à l’idée du camouflage du fortin qui fut dès lors entretenu autant que possible dans ses formes apparentes, pour maintenir l’erreur de l’adversaire. Malgré ces précautions, les pertes étaient très lourdes dans ce lieu tragique.

Il y avait presque tous les jours des morts et des blessés qu’on ne pouvait ramener que la nuit, par des corvées spéciales, qui couraient elles-mêmes les plus grands dangers et qui souvent n’arrivaient à sortir de ce terrain bouleversé et de cette boue gluante qu’en y laissant leurs chaussures enlisées dans les trous.

Le bataillon au repos à Mouilly fournissait ainsi chaque nuit une corvée chargée de remettre en état les travaux de défense détruits dans la journée, et d’approvisionner en même temps les postes dans ce secteur dénudé où toute circulation de jour était impossible à cette distance et sous les feux dominants de l’ennemi.

Ravitaillement
Cuisine aux Eparges

Le régiment devait en outre soutenir pendant les attaques, les 34e , 67e , 132e , 106e et 25e B. C. P., rôle qui sera quelquefois transformé en mission d’attaque. Le 1er décembre 1915, le 6e bataillon du 301e est au repos à Rupt-en-Woëvre, le 5e bataillon est en secteur. Le commandant PROTEAU, récemment arrivé, prend le commandement du 6e bataillon.

La relève s’effectue vers le 6 Décembre. Le secteur confié au régiment s’organisa, comme on savait le faire en 1914 ; des tranchées à la lisière du bois furent creusées, ayant des vues sur le secteur ennemi, les Éparges, Crête de Combres, Cote 373.

Des abris dans lesquels on accédait en rampant avec une ou deux épaisseurs de rondins et 0m.30 de terre, tout cela sous les bois de sapins. Les liaisons étaient établies avec le 67e au Sud, à la lisière Est du bois de Saint-Rémy, avec le 106e au Nord du Bois-Haut ; les bombardements sont intermittents et augmentent toujours les pertes.

Le commandant du régiment est installé à un poste fixé à Mouilly, au presbytère, avec l’État- Major.


Tombe du Caporal François Caussé, mort le 7 décembre 1914 et deux inconnus. (cimetière de Catenoy – Oise)

Le Caporal François Caussé est mort de maladie à l’hopital de Creil. Il avait 25 ans.

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Vers le 16 décembre, le séjour à Mouilly devenant de plus en plus dangereux, le repos du bataillon qui n’est pas en ligne, se prend à flanc du coteau entre Mouilly et la ferme d’Amblonville (à hauteur du moulin Bas).

Là encore l’on n’est pas en toute sécurité et la détente n’est pas complète. La ferme d’Amblonville devient, vers le 22 décembre, le cantonnement dit « de repos ». C’est là que Noël trouvera le 6e bataillon, le 5e étant en ligne.

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191601 eparges - Copie
Principaux lieux de la bataille des Eparges

Attaque du 26 Décembre 1914

Le 25 décembre, dans la nuit, arrive un ordre inattendu. Celui de faire participer le bataillon au repos du 301e à l’attaque du lendemain (exécutée par le 54e et le 67e ), en direction du carrefour de la route de Saint-Rémy, Vaux-lès-Palameix. Axe de marche : la tranchée de Calonne. Le 6e bataillon va prendre position derrière le 54e en lisière du bois de Saint-Rémy avec mission d’avancer au fur et à mesure de la progression du 54 e pour le dépasser au cours de l’attaque que l’on espère arrêter vers la Fourmilière-d’Herbeuville.

Un canon de 90 français à la tranchée de Calonne

Le bombardement commence vers 7 heures et la préparation laisse croire à une progression facile. Malheureusement, la concentration des feux s’est faite surtout sur les deuxièmes positions ennemies et la première ligne est presque intacte.

Au départ de la première vague d’assaut, les mitrailleuses boches entrent en action et arrêtent son élan au moment où elle aborde les défenses accessoires ennemies. La deuxième et la troisième vagues ont le même sort. Les pertes sont très lourdes. Le 67e à droite, moins éprouvé, n’a pas progressé. Il a cependant enlevé un poste avancé ennemi.

A 11 heures, le commandement se rend compte de l’impossibilité de continuer l’attaque dans ces conditions. Celle-ci sera reprise par le 301e à la tombée de la nuit, le Régiment n’ayant, jusqu’alors, joué aucun rôle actif tout en subissant des pertes sérieuses au cours de la journée.

Transport d’un blessé aux Eparges

En effet, la 21e compagnie (lieutenant FOUQUET), doit déboucher des tranchées du 54e (à l’aile gauche, lisière des bois de Saint-Rémy). Deux sections progressent à la faveur de la nuit et s’avancent d’environ 200 mètres dans l’interligne arrivant au contact des réseaux de fil de fer.

La fusillade des Boches surpris arrête le premier élan, mais les sections du lieutenant FOUQUET, maintenues sur place par le courage tranquille et la fermeté de leur chef, creusent une tranchée qu’il s’agit de relier ensuite aux tranchées de départ. La section LEBIGOT est chargée de ce travail délicat.

Les pertes du 54e et du 67e sont lourdes. Les deux régiments furent superbes d’abnégation et de courage. Le lieutenant FOUQUET est cité à l’ordre de l’armée. Le 6e bataillon du 301e est relevé le 28 et retourne à Amblonville pour deux jours. Le 5e bataillon fait deux périodes de secteur.

Le mois de janvier se passe sans incidents notables, sinon des attaques perpétuelles sur la compagnie de l’Éperon de Saint-Rémy dont une section occupe le fortin à 30 mètres de la lisière du village.

En plein terrain découvert, surplombé de tous côtés, ce réduit boueux et sans abri est un véritable enfer pour la garnison. Pris et repris le « Fortin » nous coûta fort cher. Les défenses accessoires constamment renouvelées (chevaux de frise) sont détruits ou enlevés par les petits postes allemands (quelquefois à l’aide de harpons). La section de relève qui venait au fortin de nuit avait quelquefois de désagréables surprises à son arrivée.

Exemple : L’aventure arrivée au lieutenant LEBIGOT venant y faire la relève et y trouvant une garnison boche. Il fallut ce soir là reprendre le fortin revolver au poing et faire bonne garde toute la nuit. Taquiné par ces facéties de mauvais goût le sous-lieutenant SUSINI, l’as du 6e bataillon du 301e , résolut un soir, avec sa section, de tendre une embuscade aux Boches.

Ceux-ci vinrent en effet le 11 janvier, vers 17 heures, faire leur petit coup de main quotidien. Mal leur en prit, car ils tombèrent dans le traquenard. Un sous-officier, von GERMETEUR, et un soldat furent tués à bout portant, au moment où ils s’apprêtaient à passer à la baïonnette les défenseurs résolus commandés par SUSINI. Cette petite leçon ralentit le zèle des Wurtembergois qui occupaient Saint-Rémy.

Les Francais font un prisonnier aux Eparges

C’est fin janvier que la 23e et la 24e compagnie exécutèrent sous la direction du lieutenant SUSINI, un boyau de communication entre la côte 340 et l’Éperon de Saint-Rémy, entreprise osée et périlleuse qui fut menée à bien, malgré des difficultés de toutes sortes. Ces importants travaux jouèrent ultérieurement un rôle des plus importants au cours de l’attaque du 24 avril. Le Boche ne manqua pas de manifester son inquiétude en bombardant le nouveau boyau.

Février voit arriver, avec la pluie et la boue, le début des attaques acharnées pour la possession de la crête proprement dite des Éparges. Attaques faites sur un sol détrempé la boue, dans des conditions particulièrement pénibles, arrachant pied à pied à l’arme blanche des lambeaux de terrain chaotique à l’ennemi.

Le 54e et le 67e , le 106e et le 132e attaquèrent à trois reprises différentes. La première attaque de février enleva la totalité de la crête (sauf le point X) et alla même jusqu’aux lisières de Combres. Mais faute de renforts et de réserves, les contre-attaques furieuses des Allemands rejetèrent nos troupes à la crête militaire. Les Bavarois se cramponnaient littéralement au terrain.

Les échos… et les miettes de la bataille nous arrivaient au Bois-Haut et sur la côte 340, voire même à Saint-Rémy. Après chaque attaque, le bataillon au repos allait de nuit porter sur le terrain du combat des matériaux (rondins, claies, poutres, etc., fil de fer) pour organiser les positions conquises. Ces corvées étaient des plus pénibles. Il fallait se rendre chargé d’un matériel lourd, sous les bombardements les plus violents, sur des emplacements inconnus, puisque conquis dans la journée, et s’enliser clans une boue gluante et semi-liquide. Chaque corvée nous coûtait des pertes assez sensibles.

C’est le 9 février que le commandement donna l’ordre de faire un fort coup de main pour enlever la garnison de St-Rémy.


Attaque de Saint-Rémy – 9 et 10 Février 1915

Ordre est donné de préparer pour la nuit suivante la reconnaissance offensive du village de Saint-Rémy. L’opération est confiée à une des compagnies du bataillon PÉRIÉ, (6e ), la 19e compagnie, commandée par le sous-lieutenant PILLON. La situation du régiment était la suivante : le bataillon PÉRIÉ, tenant les avant-postes, occupait face à l’est le terrain limité au sud par le chemin Saint-Rémy-Vaux-lès Palameix, au nord par le ravin, situé à 800 mètres au sud de l’église des Éparges.

Trois grand’gardes, une compagnie en réserve à la côte 340, des postes de liaison au nord et au sud, avec le 106e et le 54e . Des patrouilles faites par le 301e et le 106e , il résultait que l’ennemi occupait Saint-Rémy avec une compagnie. L’opération étudiée et préparée dans les détails dès la réception de l’ordre fut effectuée pendant la nuit du 9 au 10 février. La 19e compagnie était rassemblée sur le versant nord de la croupe de Saint-Rémy ; vers 1 heure 10, elle partait à l’attaque, une section par le ravin situé à 80 mètres environ au sud de la route Mouilly-Combres, une section par la route Vaux – Saint-Rémy, une section par le ravin situé entre la croupe de Saint-Rémy et la croupe 334, une section en soutien se portait à l’éperon de la croupe Saint-Rémy. Le sol était détrempé, une pluie fine, une nuit très obscure, ajoutaient encore à la difficulté d’établir les liaisons et rendaient la marche pénible.

A 2 heures 30, les trois sections atteignirent simultanément par une marche rampante, les abords du village. La section nord franchit la barricade établie sur la route des Éparges, tua la sentinelle, surprit le poste composé d une vingtaine de soldats, commandés par un sous-officier, abattit plusieurs hommes, et fit douze prisonniers qui furent envoyés à la réserve. L’adjudant PIERRE, chef de cette section, pénétra dans le village et se heurta à des forces supérieures qui l’obligèrent à se replier à la lisière nord du village où il se maintint. La section du centre et celle du sud se 5 heurtèrent à des réseaux de barbelé solidement établis à partir de l’église, et bordant toute la partie ouest et sud du village. Les cisailles dont elles étaient pourvues, n’étaient pas suffisamment puissantes pour couper facilement ces fils, aussi l’opération demanda du temps, beaucoup de peine, et entraîna du bruit, l’éveil fut donné avant que le travail eût été mené à bien.

Une vingtaine de fusées éclairantes furent lancées par les Allemands qui ouvrirent immédiatement un feu très nourri sur les deux sections ; elles reçurent l’ordre d’entrer dans le village, en employant les explosifs.

Avant que cet ordre ne parvint aux deux chefs de section, la section du centre avait réussi à se frayer un passage à travers le réseau. Elle était tombée à la baïonnette sur un poste allemand composé d’une vingtaine d’hommes, établis derrière une barricade sur la route de Vaux ; contre-attaquée, la section se replia sur la barricade évacuée par le poste ennemi et s’y maintint. La section du Sud utilisa les explosifs, traversa le réseau mais fut arrêtée par les feux d’un poste important établi entre les routes de Dommartin et de Vaux. Elle s’établit derrière le réseau de fil de fer et s’y accrocha.

A 4 heures 15, le chef de bataillon PÉRIÉ fit donner l’ordre aux trois sections de regagner la croupe de Saint-Rémy. Les pertes allemandes étaient de 40 tués ou blessés et 13 prisonniers. Nous laissions seulement dans cette affaire 2 soldats tués et 6 blessés qui purent rejoindre la réserve des avant-postes.

Le rapport du chef de bataillon PÉRIÉ, commandant le bataillon d’avant-postes, mentionne l’énergie et le courage, digne des plus grands éloges, des officiers et soldats qui prirent part à l’attaque. Et ceux qui se sont plus spécialement fait remarquer, méritent que leurs noms soient signalés dans cet opuscule, par les citations dont ils furent l’objet :
— Le sous-lieutenant de réserve PILLON René, commandant la 19e compagnie, a su, par son zèle, par sa tenue au feu, obtenir de ses soldats un dévouement sans réserve. A commandé sa compagnie avec intelligence, calme et sang-froid, pendant l’exécution de l’attaque.
— L’adjudant PIERRE Eugène, chargé d’enlever avec sa section un poste ennemi, a accompli intégralement cette mission, a fait 13 prisonniers et recueilli d’importants renseignements.
— Le sergent-major MARTIN Maurice, les soldats LAPLACÈRE Jean- Baptiste, SANDER Henri, au cours de l’attaque du village de Saint-Rémy, ont surpris, dans une maison, un poste de 12 hommes, qu’ils ont fait prisonniers à eux seuls.
— Le sergent WOLF Lucien, a facilité l’attaque du village de Saint-Rémy par les renseignements qu’il avait recueillis au cours de nombreuses patrouilles volontaires, exécutées depuis deux mois. A montré au cours de l’attaque la plus grande énergie.
— Le soldat FOSSE Georges, chargé de couper les fils de fer à moins de dix mètres d’un poste ennemi, a trouvé la mort dans l’accomplissement de cette mission.
— Le soldat BOISSAVY Adrien, chargé de couper des fils de fer à moins de dix mètres d’un poste ennemi, a réussi à frayer un passage à sa section. S’est élancé le premier à l’attaque de la barricade que les occupants ont immédiatement abandonnée.

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Journée du 17 Février 1915

Nous occupions dans le vallon séparant l’éperon des Côtes de Meuse où se trouvent les villages de St-Rémy et des Éparges, et nos premières tranchées étaient installées à la lisière de l’agglomération des Éparges à 600 mètres des lignes allemandes de l’Ouest. Il était dangereux de tenter inopinément un assaut de vive force sur des pentes boueuses, couvertes de fortifications, aussi la préparation de la première offensive fut-elle longue et intense.

De novembre jusqu’à mi-février grâce à d’incessants travaux de sape, les avant gardes françaises s’étaient peu à peu rapprochées de l’ennemi. Des fourneaux de mine furent enfin placés devant les tranchées allemandes et le 17 février, au matin, on y mettait le feu. La violence de l’explosion bouleversa complètement le glacis.

Explosion d’une mine

La 24e brigade participant à l’attaque, le bataillon de 1re ligne du 301e recevait l’ordre d’occuper ses positions à partir de midi (croupe de la côte 340). Quant au 6e bataillon cantonné à Mouilly, il restait en réserve à la disposition du général commandant la 23e brigade qui lui donnait à 13 heures l’ordre de se rassembler en lignes de colonnes minces et très espacées dans le ravin Sud-Est de Mouilly. Le 5e bataillon par un feu violent et ininterrompu facilitait l’avance des unités d’attaque.

L’artillerie française entrait bientôt en action et détruisait avec une remarquable précision les défenses accessoires. Pris de panique les Bavarois de la 33e division de réserve chargés de la garde de l’ouvrage s’enfuirent et les Français purent occuper successivement tout le bastion ouest.

Cependant l’ennemi réussit à se ressaisir et par un bombardement intense de 210 et de 150 rendit la position presque intenable, sans réussir toutefois à la faire évacuer. Néanmoins les Français décidèrent d’élargir leur front ; ils y réussirent ; après une lutte d’une incroyable âpreté, ils s’emparaient d’un bois de sapins qui formait comme le saillant avancé du bastion Est.

Malgré deux jours d’efforts, les Bavarois ne parvinrent pas à les en chasser. Ils durent se contenter de garder le bastion est, sommet des Éparges. Ces combats qui durèrent cinq jours furent extrêmement sanglants, les Allemands avaient perdu 3.000 hommes, la moitié de leurs effectifs.


Les Eparges, un cadavre dégagé.

Le 8e Bavarois avait été notamment décimé et l’un des survivants de cette journée écrivait à un camarade resté au dépôt : « La plus terrible journée de la guerre fut celle du mercredi des Cendres. Nous avons eu un combat effroyable ». Pourtant sans se décourager, les Allemands renforcèrent leurs ouvrages, concentrant de nouvelles batteries lourdes, remplaçant les corps trop éprouvés.

Bientôt ils enverront de Metz, cinq bataillons de pionniers avec un grand nombre de mitrailleuses et de lance-bombes. Ils creuseront des abris-cavernes, forés jusqu’à 8 mètres sous terre, comportant des chambres de repos et un chemin de fer à voie étroite. Ainsi préparés, ils attendront avec confiance, décidés à tout sacrifier pour garder la crête des Éparges.


Durant cette période, le 301e aura un rôle bien ardu, celui de tenir dans un secteur particulièrement difficile, les deux bataillons alternent pour l’occupation du secteur d’attaque, pendant que l’un ne cesse d’alimenter le feu, l’autre alerté constamment, se tient toujours prêt à être porté là ou le commandant jugera opportun l’emploi des réserves. Rôle ingrat, particulièrement énervant.

De nouvelles attaques se produisirent les 13 et 27 mars, mais l’assaut décisif fut ajourné au 5 avril où la 12e division d’infanterie attaquait le long des côtes de Meuse avec premier objectif la hauteur des Éparges, l’attaque s’opérait en liaison gauche avec la division de marche de Verdun, qui avait à agir de Trésauveaux sur Avillers.


L’attaque des Éparges allait être déclenchée à 16 heures par la 24e brigade qui disposait du bataillon du 67e à Montgermont. Quant à la 23e brigade, elle devait prendre à partir de 6 heures ses dispositions pour contenir l’ennemi sur ses positions de combat, avec le 54e et le 301e le 5e bataillon en 1re ligne, le 6e bataillon à cheval sur la tranchée de Calonne. A 4 heures de l’après-midi, malgré la pluie torrentielle qui rend le terrain difficile (nos fantassins peinent à sortir leurs souliers de la boue), les deux régiments s’élancent et s’installent à l’Ouest du sommet, arrêtés seulement par les torpilles aériennes.

Mais, le lendemain, 6 avril, à la pointe du jour, une contre-attaque allemande menée par des troupes fraîches reprend le terrain perdu, tout est à recommencer et il pleut toujours ! Avec une inlassable ténacité, les Français remontent le soir même à l’assaut progressent vers le sommet et toute la nuit, par d’incessantes charges à la baïonnette, refoulent l’ennemi.

Les français à l’attaque aux Eparges

Le 7 avril, au matin, nous avions enlevé plus de 700 mètres de tranchées et ce gain non seulement se conserve, mais s’accroît. En vain, de gros renforts arrivent aux Allemands, leurs tentatives d’attaques sont arrêtées par l’artillerie française qui empêche leurs colonnes de déboucher.

L’artillerie française bombarde les positions allemandes aux Eparges

Les deux adversaires sont à ce point épuisés que la nuit se passe dans un calme à peu près complet.

Mais le 8 avril, à 9 heures, deux régiments d’infanterie et le 25e B. C. P. reçoivent l’ordre d’en finir. A la baïonnette ils enlèvent en une heure le sommet et la crête à l’Ouest. Toute la journée la lutte se poursuit acharnée de part et d’autre.

Combat sur la crète.

A minuit, nos troupes tiennent la presque totalité de la position. Elles ont conquis 1.500 mètres de tranchées dont le bastion formidable du sommet. L’ennemi ne possède plus qu’un petit triangle à l’extrémité orientale.

Le 9 avril, nouvelle attaque qui se termine à 10 heures du soir, le massif des Éparges était entièrement entre nos mains. Nous dominions la Woëvre dans toutes les directions, malgré les sacrifices consentis (en deux mois les Allemands ont perdu 30.000 hommes), malgré les avantages que leur donnaient la nature du terrain et la force des positions, les Allemands avaient dû céder à l’ascendant de nos forces. Les Éparges témoignent de la haute valeur des soldats du 301e , de leur esprit de sacrifice, de leur ténacité et de leur bravoure. Mais il ne suffisait pas de conquérir, il fallait conserver ; l’adversaire était tenace, et ne manquait lui non plus, ni de courage ni d’adresse, aussi les journées qui suivirent furent-elles pour le régiment très mouvementées.


La journée du 21 avril fut particulièrement active, la veille le 301e recevait l’ordre de relever par un de ses deux bataillons disponible, celui de Mouilly, la position conquise et occupée par le 25e B. C. P.

L’opération venait de s’effectuer quand quelques heures plus tard, vers 4 h.30 du matin, un bombardement violent arrosait les emplacements nouvellement occupés par le 301e , en même temps qu’une forte contre-attaque allemande était lancée contre nous, le bataillon réussit non sans difficultés à repousser l’ennemi et à maintenir intact le terrain dont il avait la garde. A 16 heures, la 23e compagnie (SUSINI) recevait l’ordre d’attaquer sur le réduit des Éparges, le fameux point X qui domine la Woëvre, le mouvement se déclenche à 18 h.15.

Au bout d’un quart d’heure à peine, la compagnie SUSINI s’emparait à la baïonnette de deux lignes de tranchées ennemies, mais bouleversées par des explosions de mines suivies aussitôt par une contre-attaque allemande.

Il restait cependant encore aux mains de l’ennemi dans le secteur d’attaque du 301e un seul point sur la crête militaire qui permettait au Boche d’avoir une vue sur le versant nord des Éparges: le point X. La compagnie SUSINI l’enlevait de haute lutte le 11 avril, à 18 h.30 du soir.

Les fantassins prennent le point X. Il y a deux cadavres au premier plan.
NB: Le point X sera repris par les allemands ultérieurement
Progression des français au point X

A la suite, de l’attaque du 11 avril, le lieutenant SUSINI était cité à l’Ordre de l’Armée ainsi que les adjudants DIANA et BRETON. Le lieutenant LEBIGOT était cité également à l’Ordre du Jour dans les termes les plus élogieux.

Cette unité héroïque, au tiers de son effectif, contre-attaque de nouveau. SUSINI, blessé à la tête, est. malgré sa blessure, en avant de sa troupe ; l’adjudant-chef DIANA, blessé à mort, tombe en s’écriant : « Passez sur moi ! mais en avant ! » Mais ces efforts désespérés se brisent devant le déluge de fer qui oblige les survivants à regagner leurs emplacements de départ. Toute la nuit du 11 au 12 avril, le régiment subit un bombardement intense de pièces de tous calibres.

Le 12, au soir, le 5e bataillon, renforcé d’un escadron à pied, occupe les tranchées de la côte 340 sans qu’aucun événement particulièrement intéressant se produise dans ce secteur. Le 6e bataillon (Bataillon PROTEAU) s’empare d’une tranchée.

Les Eparges, dans une tranchée conquise

Pendant ces dures journées, le régiment, si harassé qu’il soit, fait preuve de belles qualités d’entrain et d’endurance, ses lourdes pertes journalières n’ont pas un instant ralenti son ardeur. Les exemples de courage collectifs et individuels sont fort nombreux. Chacun a fait son devoir.

Le général HERR, commandant le VIe Corps d’armée, envoie le 20 avril l’ordre général suivant : « Pendant cinq mois, avec une ténacité dont les guerres précédentes n’avaient pas fourni d’exemple, les troupes de la 12e D. I. ont poursuivi le siège de la formidable forteresse que nos ennemis avaient établie sur la hauteur des Éparges. En dépit des obus, des mitrailleuses et des torpilles, ces troupes héroïques, libérant chaque jour, au prix de leur sang, quelque nouvelle parcelle du sol national, ont gravi pas à pas les pentes escarpées de la hauteur. Soutenues par une artillerie admirable dont la vigilance n’a jamais été surprise, elles ont repoussé dix-huit contre-attaques, infligeant aux troupes opposées des pertes si sanglantes qu’elles durent être entièrement relevées. « Hier enfin le succès définitif est venu couronner leurs efforts ! Combattants des Éparges, vous avez inscrit une page glorieuse dans l’Histoire, la France vous en remercie. » Au Quartier Général, le 20 Avril 1915. Le Général commandant le 6e Corps d’Armée. (Signé) HERR,

La citation à l’Ordre de l’Armée vient couronner les exploits héroïques de la 12e division et du 25e bataillon de chasseurs. Ordre de l’Armée . Le général commandant l’armée cite à l’Ordre de l’Armée la 12e division d’infanterie et le 25e B. C. P. : « Ont donné depuis le début de la campagne de nombreuses marques de haute valeur, qu’ils viennent encore d’affirmer en s’emparant, après une lutte qui a duré plus d’un mois, de la position fortifiée des Éparges dont ils ont complètement chassé l’ennemi. Parmi les actions brillantes de la 1re armée, ce combat est le plus brillant. Il a valu à la 1re armée un radiotélégramme du général commandant en chef qui a été communiqué à toutes les armées et qui est ainsi conçu : « Le général commandant en chef adresse l’expression de sa profonde satisfaction aux troupes de la 1re armée qui ont définitivement enlevé la position des Éparges à l’ennemi. L’ardeur guerrière dont elles ont fait preuve, la ténacité indomptable qu’elles ont montrée lui sont un sûr garant que leur dévouement à la Patrie reste toujours le même. Il les en remercie. » (Signé) ROQUES.

Ainsi le massif des Éparges était en entier aux mains des Français. Les Éparges, après Vauquois, témoignent de la haute valeur des soldats de l’Argonne et de la supériorité qu’en cette lutte sans arrêt ils ont peu à peu conquise sur l’ennemi.

Les jours qui vont suivre vont être employés par le régiment à tenir et à organiser les positions de première ligne toujours violemment bombardées, les pertes sont nombreuses tant en officiers qu’en hommes de troupe.

Le 15 avril, le commandant de la 21e compagnie, le lieutenant PACCARD est tué par un éclat d’obus. La veille, le lieutenant FOUQUET revenait assez sérieusement blessé dans la nuit.

Le 17 avril, le 6 e bataillon est relevé de sa position par du 25e B. C. P. et du 72e R. I. et rejoint Mouilly. Quant au 5e bataillon, il reste en première ligne soumis à un bombardement continuel et particulièrement intensif dans les journées des 21, 22 et 23 avril.

C’était le signal de la revanche que les Allemands allaient essayer de prendre en attaquant de flanc les positions des Éparges, qui venaient de leur être enlevées.

Ils avaient pris pour cela les dispositions les plus minutieuses et les plus puissantes et une division d’infanterie fraîche venue de Metz par voie ferrée, se tenait prête à aborder les lignes du 67e sur la tranchée de Calonne, dès que ces lignes auraient été rompues par un déluge d’artillerie comme nous n’en connaissions pas encore.


Woevre Calonne 1915 . Le point X est au centre de ce plan

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Combat de la Tranchée de Calonne (24 avril 1915)

La tranchée de Calonne est la route qui traverse toute la forêt d’Amblonville, le Bois-Bouchot et la forêt de la Montagne, pour aboutir, après une vingtaine de kilomètres, au carrefour d’Hattonchâtel. Les braconniers et les chasseurs étaient, autrefois, seuls à la connaître et à la parcourir, et. les jours de battue, c’était une des pistes connues du gibier. La tranchée de Calonne évoque désormais des jours plus tragiques ; le nom de tranchée pourrait faire croire que c’est un souvenir de la grande guerre. Il n’en est rien, et depuis plus d’un siècle, c’est ainsi que l’on désigne la route que M. de Calonne, ministre des finances de Louis XVI fit tracer sur la crête des Monts pour accéder à son château, bâti au pied des Hauts-de-Meuse.

Ce château fut détruit pendant la Révolution. On dit que Calonne avait un jour l’espoir de recevoir le roi dans sa résidence, et voulant l’accueillir dignement avait fait planter des rosiers tout le long de la route. Le fait est que pendant la guerre, on vit des roses sauvages éclore le long de ce chemin forestier devenu vraiment une tranchée au sens militaire du mot. Le front coupait la tranchée de Calonne un peu au Sud-Ouest de Saint-Rémy, dans le bois Bouchot. De part et d’autre, on se canonnait et on se tenait en haleine par des attaques et des contre-attaques perpétuelles.

En mars 1915, on y installe des pièces de marine de 140 destinées à tirer à 12.000 mètres par dessus les Éparges, à l’intérieur des lignes ennemies. Les marins mettent péniblement leurs lourds canons en batterie dans ce sol argileux qui glisse sans cesse. Ce bombardement efficace irritait beaucoup les Allemands et leur avait fait énormément de mal pendant les combats récents du mois d’avril aux Éparges et au delà.

Dans leur terrible attaque du 24 avril, ils allaient être sur le point de pousser leur infanterie jusqu’à ces pièces et de les enlever. A telle enseigne que les officiers de marine, isolés dans leur poste dont les fils téléphoniques étaient coupés, sans communication avec l’infanterie, durent organiser en hâte leur défense et balayer le terrain avec le tir de leurs seules pièces lourdes et quelques 75 amenés à bras qui tirèrent alors à débouchoir 0.


Mais examinons ce qui se passe dans le secteur d’infanterie pendant cette première journée de l’attaque allemande sur la tranchée de Calonne. Après trois jours d’un bombardement sans précédent, par pièces de tous calibres, le matin du 24, le tir allemand s’allonge pour être dirigé sur Mouilly et les voies d’accès en arrière.

A 11 heures 15, le 6e bataillon (PROTEAU) quitte Mouilly pour occuper son emplacement de soutien dans le ravin Sud-Est de Mouilly, au Nord de la route Mouilly-Combres, près du P. C. du 67e R. I. Ce mouvement s’effectue sous une pluie de mitraille, il atteint non sans peine les pentes de la côte 272, la gauche appuyée à la tranchée de Colonne, les compagnies disposées en ligne de section à 50 mètres d’intervalle ; mais à ce moment précis, une poussée formidable de l’infanterie allemande se produit derrière le tir allongé de son artillerie et le 67e R. I. est alors absolument submergée par l’avalanche. Celle-ci ne fut arrêtée que par la vigoureuse résistance qu’opposèrent les compagnies du bataillon PROTEAU, sur les positions de soutien qu’elles venaient d’occuper.

Heureusement cette première vague d’assaut allemande ne fut pas soutenue immédiatement, ce qui permit au bataillon de rétablir momentanément la situation par de vigoureuses contre-attaques jusqu’au moment où, vers 16 heures, arrivait à la rescousse tout le 54e R. I., appelé en hâte de Rupt.

Relevé par ce régiment, le capitaine de MONTALEMBERT qui a pris le commandement du 5e bataillon en remplacement du commandant PROTEAU blessé, rassemble les débris du bataillon et les ramène sur le plateau à l’est de Mouilly, où ils s’installent pour la défense rapprochée du village, d’après les ordres du général de brigade.

Il ne restait plus que 153 hommes sur les rangs et la plupart des officiers avaient été tués ou blessés dans cette terrible affaire.

Quant au 5e bataillon, violemment bombardé sur ses positions de la cote 340, il est bientôt attaqué en masses compactes, il oppose à l’ennemi une résistance acharnée et maintient à peu près toutes ses positions, sauf l’éperon Saint-Rémy, qui n’était d’ailleurs occupé que par une demi section. Il fait même quelques prisonniers.

A minuit, le 6e bataillon, relevé sur ses emplacements de Mouilly par le 54e R. I. reçoit l’ordre, malgré l’état d’épuisement et d’usure où il se trouve, de se rendre à la côte 340 qui doit servir de point d’appui et de pivot à une contre attaque projetée par la division pour le lendemain. Il se met en route immédiatement par le carrefour Mouilly-les Éparges et le Bois Haut, et arrive à l’aube, c’est-à-dire à 5 heures du matin, dans le ravin de Genonsevaux, derrière le 5e bataillon, pendant que le lieutenant-colonel parcourt les lignes de ce dernier bataillon pour vérifier la situation et confirmer les ordres donnés par écrit pendant la nuit.

Le bombardement qui s’était ralenti pendant la nuit, reprend alors avec une nouvelle intensité dès 6 heures du matin, pour se maintenir toute la matinée et jusqu’à l’attaque générale allemande de l’après-midi.

Bien que refoulés la veille par le 54e , les Allemands n’avaient pas pu être chassés complètement du Bois Haut et des trous étaient restés dans les lignes de ce régiment. Dès la nuit l’ennemi en avait profité pour s’infiltrer peu à peu dans ce bois et pour se rabattre ensuite pendant la matinée sur les derrières du 301e ; à partir de 2 heures de l’après-midi, l’attaque allemande est poussée à fond et en masses compactes. Les compagnies qui occupent l’éperon 340 sont entourées et doivent sortir des tranchées pour faire face de tous les côtés à la fois à l’ennemi, dont la résistance est acharnée, les hommes courent se ravitailler en munitions dans les tranchées et reviennent sur la ligne de feu.

Les masses allemandes, par instant arrêtés, sont sans cesse renouvelées. Comme un essaim débordant, toujours plus nombreux, l’ennemi se rue dans les tranchées. Les hommes se groupent autant qu’ils le peuvent faire et se font une trouée à travers les lignes adverses lorsque celle-ci est possible. Tous ceux qui ont pu passer à travers les lignes allemandes se groupent sous les ordres du lieutenant FOUCAUD qui commande en arrière des bataillons la compagnie du Bois Haut et qui se met lui même à la disposition du commandement du 25e B. C. P. sur la route Mouilly – Les Éparges.

Il est alors chargé d’une contre-attaque malheureusement trop tardive. Non seulement la contre-offensive annoncée dans la nuit par la division ne s’était pas produite à temps, mais il n’avait été répondu que par des promesses sans suites à tous les appels et à tous les comptes-rendus adressés dès le matin à la brigade par le lieutenant-colonel et dans lesquels cet officier supérieur s’efforçait de signaler la gravité croissante de la situation. Il y a lieu de croire que les moyens manquaient de parer à cette situation ou que ces moyens arrivèrent trop tard.

Dans cette effroyable tourmente, le lieutenant-colonel commandant le régiment, son adjoint le capitaine LHUILLIER, le commandant PÉRIÉ, le capitaine de MONTALEMBERT, les lieutenants PILLON, FRÉMONT, les sous-lieutenants LHERMIER, JARDIN, BEAU, BORGNIES-DESBORDES et HABERT ont disparu, sont tués ou prisonniers.

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Le lieutenant GAU reçoit l’ordre de rassembler ce qui reste du régiment et d’organiser sur les hauteurs de Mouilly un centre de résistance.

26 avril. — Tandis que les marins se préparent à sauver l’honneur en résistant jusqu’à la mort à l’attaque ennemie, deux bataillons de chasseurs, appelés en renfort, se glissent sous les fourrés, s’infiltrent lentement et commencent la contre-attaque qui n’avait pu être faite la veille. Ce même jour les rescapés du 301e restent à la disposition du commandant CABOTTE du 25e B. C. P. qui leur assigne la garde des tranchées en bordure de la route de Mouilly – Les Éparges, dans la partie comprise entre le boyau parallèle à la tranchée de Calonne, à 300 mètres de celle-ci et la carrière située au sommet de la crête qui domine le village des Éparges.

Le lieutenant GAU qui a pris le commandement de ce qui reste du 301e , s’installe avec le drapeau et la C. H. R. dans le ravin d’Amblonville.


Dans ces trois journées, le régiment avait perdu un effectif de 663 officiers et soldats.

Fosse commune aux Eparges / avril – mai 1915

Le 27 avril. — La fusillade s’éloigne mais l’ennemi se reforme et ré-attaquera le 5 mai. Le premier bond lui donne quelques succès, vite arrêtés d’ailleurs par l’entrée en ligne de la brigade marocaine et de six bataillons de chasseurs qui reconquièrent en quelques heures tout le terrain perdu le 24 avril à l’exception de la côte 340.


A l’issue de ces formidables combats, le général commandant la 12e D. adresse le 1er mai 1915 au lieutenant-colonel commandant le 301e la lettre suivante : « Le général commandant la 12e division, adresse toutes ses félicitations au 301e pour l’énergie, la vaillance et le courage magnifique dont il a fait preuve au cours des jour« nées des 24, 25 et 26 avril en défendant jusqu’à la mort les positions qu’il occupait. Il a rendu compte de la conduite de ce régiment à l’autorité militaire supérieure et demandé pour lui une citation à l’ordre de l’armée ». Signé : PAULINIER .

Peu après ces rudes combats, le haut commandement décidait de réorganiser les régiments de réserve en les formant à trois bataillons ; cette mesure imposait la dissolution d’un régiment sur trois : le 301e R. I. était désigné, en raison des lourdes pertes qu’il venait de subir, pour verser ses cadres et ses hommes aux 315e et 317e R. I.

Ainsi se terminait la courte, mais glorieuse épopée du 301e .



Pour n’avoir pas assisté au jour glorieux de la Victoire, les Braves du 301e qui ont vaillamment combattu dans ses rangs, ceux qui se sont sacrifiés pour la défense de la Patrie ont néanmoins contribué pour une large part au succès final.

Aussi, le 14 juillet 1919, le drapeau du 301e avec sa garde faite des vaillants des batailles de la Meuse et des Éparges, défilait fièrement sous l’Arc de Triomphe : juste hommage rendu aux morts et aux vivants qui servirent à l’ombre de ses plis glorieux.


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Vignette du régiment 1915

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